Dans le temps où les métiers n’étaient pas connus, vivaient dans le pays du Fouta trois frères : l’aîné Amady, le second Samba et le cadet Demba. Une grande famine s’étendit sur le pays et les plus riches même en souffraient. Les trois frères, encore en bas âges, ramassaient du bois qu’ils échangeaient contre des poignées de mil, leur seule nourriture.

Un jour, dans la brousse, tandis qu’Amady et Demba cherchaient du bois ensemble, Samba, resté seul, rencontra un Koumène auquel il fit part de sa triste situation et de celle de ses frères. Le Koumène eut pitié de lui et lui remit une corde et un morceau de bois, lui conseillant de revenir à la tombée de la nuit, d’allumer un grand feu, d’y jeter le morceau de bois. Il verrait alors sortir une vache du fleuve, elle s’approcherait de lui, il devrait l’attacher avec une corde et aurait besoin de se coucher auprès d’elle pendant toute la nuit. En suivant ces conseils, il aurait de quoi nourrir ses frères et subvenir à leurs besoins.

A la tombée de la nuit, Samba, suivit les conseils du Koumène, alluma le feu, vit sortir la vache qu’il attacha et resta à côté d’elle. Toute la nuit, la vache mugit et à chaque mugissement d’autres vaches sortaient du fleuve en grand nombre et se groupaient autour de la vache de Samba. Chacune avait un veau ou une génisse ; au lever du jour, Samba possédait ainsi un grand troupeau. Ses frères, inquiets sur le sort de Samba, le trouvèrent occupé à construire une petite case en paille au milieu d’un beau troupeau de vaches laitières. Ils s’installèrent avec lui et furent heureux, mais il leur manquait des calebasses pour recueillir le bon lait. Heureusement, l’aîné, Amady, eut l’idée d’aller au village voisin chercher une hache avec laquelle il façonna dans le bois des calebasses pour les besoins de leur ménage.

Les femmes du village voisin venaient souvent voir les trois frères pour obtenir un peu de lait et quelquefois de la viande de leur troupeau. Trois d’entre elles s’unirent avec eux et ils eurent une nombreuse descendance.

Demba, le plus jeune, avait une très belle voix, et chaque fois qu’il chantait, le campement se groupait autour de lui pour l’écouter.

A la mort des trois frères, leurs enfants prirent chacun le métier de leur père.

Les enfants d’Amady continuèrent à travailler le bois, à façonner des calebasses, pilons et mortiers. Ce furent les Laobés.

Les enfants de Samba se livrèrent à l’élevage du bétail et à la garde des troupeaux. Ce furent les Peuls ou les Foulbés.

Les enfants de Demba continuèrent à charmer les habitants du campement par leur chant, ce furent les Wambâbés. Depuis ce temps-là, Peuls, Wambâbés et Laobés sont toujours voisins.

Source : REUSS-NLIBA, Jessica et Didier, 2018. Aux origines du monde : contes et légendes du Sénégal. Paris : Éditions Flies France. ISBN 978-2-37380114-9, p. 32.